Définition internationale du travail social approuvée par l’assemblée générale de IASSW le 10 Juillet 2014 Melbourne.
Le Travail social est une pratique professionnelle et une discipline. Il promeut le changement et le développement social, la cohésion sociale, le pouvoir d’agir et la libération des personnes. Les principes de justice sociale, de droit de la personne, de responsabilité sociale collective et de respect des diversités, sont au cœur du travail social. Etayé par les théories du travail social, des sciences sociales, des sciences humaines et des connaissances autochtones, le travail social encourage les personnes et les structures à relever les défis de la vie et agit pour améliorer le bien-être de tous.
Ce commentaire a pour but de préciser les concepts clés utilisés dans la définition et détaille les mandats centraux, principes, connaissances et pratiques de la profession des métiers du social.
Au cœur des missions de la profession de travailleur social se trouve l’objectif de favoriser le changement social, le développement social, la cohésion sociale, le pouvoir d’agir, la libération des personnes.
Pour la profession de travailleur social les liens et les interactions entre les facteurs historiques, socio-économiques, culturels, spatiaux, politiques et personnels, sont, de fait, des opportunités et/ou des barrières au bien-être et au développement humains. Les barrières structurelles contribuent à perpétuer des inégalités, la discrimination, l’exploitation et l’oppression.
Là où les objectifs sont le pouvoir d’agir et la libération des personnes, le développement d’une conscience critique par la réflexion sur les sources structurelles d’oppression et/ou de privilèges ainsi que le développement de stratégies d’actions visant l’élimination de ces barrières structurelles et personnelles, sont essentiels. Par solidarité avec les personnes désavantagées, la profession s’efforce de soulager la pauvreté, de libérer les personnes vulnérables et opprimées, et de promouvoir l’inclusion sociale et la cohésion sociale.
La mission de changement social est légitimé par cela même qui fonde l’intervention sociale. En effet, celle-ci est mise en place lorsqu’une situation, que ce soit au niveau de la personne, de la famille, d’un groupe restreint, d’une communauté ou d’une société, est estimée nécessiter un changement. Elle est guidée par le besoin de défier et changer les conditions structurelles qui contribuent à la marginalisation, à l’exclusion sociale et à l’oppression. Les initiatives de changement social reconnaissent l’importance d’une capacité d’action éclairée pour la promotion des droits humains de justice économique, environnementale et sociale. La profession est de même mobilisée pour le maintien d’une stabilité sociale, dès lors que celle-ci n’a pas pour but de marginaliser, exclure ou oppresser un groupe de personnes en particulier.
Le concept de développement social permet de penser les stratégies d’intervention, les buts poursuivis et un cadre politique. Ce dernier est considéré comme l’articulation des attentes populaires et des structures institutionnelles. Il est basé sur des appréciations holistiques, « bio-psycho-sociales », et des interventions qui transcendent la division micro-macro, s’intégrant à des niveaux de système multiples et à des collaborations intersectorielles et interprofessionnelles. Il donne la priorité au développement socio-structurel et économique et ne souscrit pas à la pensée commune qui veut que la croissance économique soit la condition préalable au développement social.
Les principes fondateurs du travail social sont le respect de la valeur intrinsèque des êtres humains et de leur dignité, mais aussi chercher à ne pas nuire, promouvoir le respect de la diversité, la défense des droits humains et la justice sociale.
La défense et le respect des droits humains et la justice sociale sont la motivation et la justification du travail social. La profession reconnait que les droits humains doivent cohabiter avec la responsabilité sociale collective. L’idée de responsabilité sociale collective rappelle que dans les faits les droits humains individuels ne peuvent être respectés au jour le jour que si chacun se sent responsable envers les autres et réalise l’importance de créer des relations réciproques à l’intérieur des communautés. Par conséquent un des objectifs premiers du travail social est de défendre les droits individuels à tous les niveaux et de favoriser les occasions dans lesquelles les individus prennent la responsabilité du bien-être des autres, prennent conscience et respectent l’interdépendance entre d’une part les individus et d’autre part, les individus et l’environnement.
Le travail social englobe les droits de première, deuxième et troisième génération. :
Dans certains cas «ne pas nuire » et « le respect de la diversité » peuvent représenter des valeurs conflictuelles, comme lorsqu’au nom d’une certaine culture les droits, dont ceux à la vie, d’une minorité telle que les femmes et les homosexuels sont bafoués. Les références mondiales pour les formations au travail social* préconisent, face à ce problème, que les travailleurs sociaux soient formés à une approche de base des droits humains, avec cette note explicative :
Une telle approche facilitera peut-être une confrontation constructive et un changement là où certaines croyances, valeurs et traditions culturelles bafouent les droits élémentaires de la personne. Puisque la culture est basée sur la société et est dynamique, elle est sujette à la déconstruction et aux changements. Les confrontations constructives, déconstructions et changements pourront être favorisés grâce à une mise au point et à une prise de connaissance des valeurs, croyances et traditions d’une culture donnée et via un dialogue critique et réfléchi avec des membres d’une communauté concernant les questions plus générales de droit des personnes.
* The Global Standards for Social Work Education and Training
Le travail social est interdisciplinaire et trans-diciplinaire, et s’inspire d’une vaste gamme de théories scientifiques. «Science » est ici à comprendre en son sens le plus basique, celui de connaissance. Le travail social fait sans cesse appel à ses fondations théoriques en perpétuel développement, ainsi qu’à des théories issues d’autres sciences humaines comprenant entre autres le développement communautaire, la pédagogie sociale, l’administration, l’anthropologie, l’écologie, l’économie, l’éducation, le management, les soins infirmiers, la psychiatrie, la psychologie, la santé publique et la sociologie. Ce qui différencie les théories en travail social c’est qu’elles sont appliquées et émancipatoires. Une grosse part de la théorie du travail social est élaborée avec les personnes concernées dans un processus interactif et d’échange, et par conséquent alimentée par des situations pratiques spécifiques.
La définition proposée, pose que le travail social est nourri, non seulement par les situations pratiques spécifiques et les théories des pays occidentaux mais aussi par les connaissances traditionnelles et autochtones. L’héritage du colonialisme a fait que les connaissances et théories occidentales ont été exclusivement valorisées alors que les connaissances traditionnelles ont été dévaluées, méprisées et assimilées par les théories et connaissances occidentales. Cette définition vise à stopper ce processus et à renverser cela, en reconnaissant que les peuples indigènes de chaque région, pays ou territoire ont leurs propres valeurs, connaissances et modes de transmission de ces connaissances. Ceci contribue de façon inestimable à la science. Le travail social tente de rectifier l’hégémonie et le colonialisme scientifique historique de l’Occident en se mettant à l’écoute et en apprenant auprès des peuples indigènes autour du monde. De cette façon les connaissances du travail social se fonderont et se développeront en accord avec les peuples indigènes et seront mises en pratiques de façon plus adaptée au plan local et international. En se basant sur le travail des Nations Unies, l’IFSW donne la définition suivante des peuples indigènes :
La méthodologie participative défendue dans le travail social est posée ainsi « encourager les personnes et les structures à relever les défis de la vie et améliorer le bien-être des personnes». Autant que possible le travail social favorise le travail « avec » plutôt que « pour ». En accord avec le paradigme du développement social, les travailleurs sociaux font appel à une multitude de compétences, techniques, stratégiques, principes, et activités. Ceci à différents niveaux de systèmes, et de buts :- système de maintenance et/ou les système de changement-. Le travail social englobe une gamme d’activités incluant plusieurs formes de soins et d’aide psychologique, de travail de groupe et dans les communautés, d’analyse et de formulation de directives et de promotion des interventions politiques. Dans une perspective d’émancipation, cette définition préconise des stratégies de travail social ayant pour but d’améliorer l’espérance des personnes, leur confiance en elles, leur potentiel créatif et leurs capacités à confronter et défier les dynamiques de pouvoir oppressif ainsi que les sources structurelles d’injustice. Elles s’incorporent ainsi dans une dimension d’intervention cohérente, reliant micro-macro, individuel-politique. L’approche holistique du travail social est universelle mais dans la pratique le travail social varie d’un pays à l’autre, et parfois même en fonction de conditions historiques, culturelles, politiques ou socio-économiques.
Il en va de la responsabilité des travailleurs sociaux à travers le monde de défendre, enrichir et donner réalité aux valeurs et principes énoncés dans cette définition. Une définition du travail social n’a de sens que lorsque les travailleurs sociaux s’engagent à respecter ses valeurs et ses visions.